Le Festival Alimenterre propose une sélection de films documentaires qui mettent en évidence les désordres agricoles et alimentaires et proposent des alternatives pour relever ces défis à l’échelle locale et mondiale.
Depuis 2016, notre Festival Alimenterre s’exporte également dans des pays partenaires de SOS Faim, l’ONG organisatrice. Le festival permet entre autres de créer des discussions et des réflexions entre les différents acteurs autour de thèmes divers comme les enjeux de l’agriculture paysanne ou les solutions pour se tourner vers une agriculture juste et durable.
Le début de la pandémie de Covid-19 en mars 2020 a rapidement exposé les défaillances d’un système agroalimentaire globalisé qui fragilise les chaînes de production et de distribution dans les pays du Sud depuis des décennies. Dans ce contexte difficile, les éditions internationales du Festival Alimenterre ont plus que jamais un sens et un rôle à jouer pour interroger nos modèles agricoles et alimentaires.
Heureusement, la situation sanitaire très contrastée dans les pays d’Afrique, qui reste jusqu’à présent le continent le moins touché par la pandémie, a permis que les éditions sénégalaise et congolaise du festival se tiennent majoritairement en présentiel, sans trop d’impact sur la programmation.
Au Sénégal, un espace d’échanges qui séduit de plus en plus
La troisième édition du Festival Alimenterre au Sénégal s’est tenue du 10 au 28 novembre à Dakar et dans plusieurs régions du pays. Nous sommes heureux de constater que le festival a de plus en plus de succès, comme nous confirme Ibrahima Fall, organisateur :
Le festival a suscité un grand intérêt de la part du public qui a suivi les évènements en présentiel ou à distance par vidéoconférence. Les thèmes des films projetés ont permis de discuter de thématiques très riches autour des enjeux agricoles, de la sécurité alimentaire et nutritionnelle.
Au programme cette année, on retrouvait effectivement trois films révélés lors du Festival Alimenterre Belgique 2019 : « Semences du Futur », « Faut-il arrêter de manger les animaux ? » et « Minga, voix de résistance », ainsi que le film « Mexique, sous l’emprise de Coca » diffusé au Festival Alimenterre France 2018.
En plus de proposer de nombreux films, le festival « a offert à chaque localité un cadre d’échange avec les collectivités territoriales, les services techniques étatiques, les acteurs agricoles et les populations pour discuter en profondeur de problèmes spécifiques à chaque zone, comme par exemple, la gestion des ressources naturelles ou l’accès aux intrants », précise Ibrahima.
Dominique Morel, chargée des partenariats au Sénégal pour SOS Faim, explique ce qui fait selon elle la richesse des échanges dans cet évènement particulier :
L’unicité du Festival Alimenterre au Sénégal, c’est d’abord qu’il est couplé avec la FIARA (foire internationale de l’agriculture et des ressources agricoles) : cela lui donne un ancrage très paysan, que l’on retrouve également dans les nombreux débats et discussions autour des films, qui rassemblent davantage les acteurs institutionnels, politiques, ONG locales, mouvements de jeunes et organisations paysannes que les citoyens lambda, simple consommateurs ou cinéphiles.

Par ailleurs, de nombreuses animations culturelles étaient également proposées, comme des démonstrations culinaires de recettes locales afin de sensibiliser les festivalier·ère·s à l’importance de consommer des aliments sains et locaux, dans un pays où les produits importés et bon marché ont un impact sévère sur la production locale et la santé des consommateur·rice·s. Une tendance qui, d’après Dominique, « reflète bien le besoin des organisateurs de démultiplier les espaces de sensibilisation et de dialogue politique sur les enjeux de l’agriculture et de l’alimentation de demain », dans l’optique d’ouvrir le festival à un public sénégalais plus large, moins spécifique.
En RDC, un rendez-vous annuel devenu incontournable
En République démocratique du Congo, la quatrième édition a eu lieu du 5 au 18 décembre à Kinshasa et dans diverses provinces du pays. Baron Nkoy, organisateur, nous en parle :
Le Festival Alimenterre en RDC est devenu un grand rendez-vous annuel pour les paysans et acteurs agricoles. Je crois que plus les années avancent, plus l’attente du public sur le festival est importante. Cela est dû aux multiples défis que les paysans, producteurs, agriculteurs et consommateurs des produits agricoles rencontrent.
Un avis que rejoint François Cajot, chargé des partenariats en RDC pour SOS Faim :
Le festival est un évènement unique et nécessaire, car les congolais n’ont pas l’occasion de voir les alternatives qui fonctionnent dans le monde face au modèle dominant de l’agrobusiness et des parcs agro-industriels, tel que promu par le gouvernement et la Banque mondiale. Il y a une perte de confiance dans l’agriculture locale qui est vue uniquement comme une agriculture de subsistance, une agriculture du pauvre. En même temps, près de 2 milliards de dollars sont dépensés chaque année pour importer de la nourriture de mauvaise qualité dans le pays, alors qu’on pourrait investir dans le développement d’une agriculture durable de qualité.

Le festival est donc tout d’abord un lieu de conscientisation face aux enjeux du secteur agroalimentaire congolais, mais il met surtout en lumière des alternatives qui redonnent confiance et l’envie d’agir aux citoyen·ne·s :
« Grâce au festival, les perspectives changent, les fermiers et paysans qui participent à cette rencontre commencent à croire que, non seulement ils peuvent faire quelque chose pour changer, mais également qu’ils vont y arriver ! » conclut Baron.
Côté programmation, en plus de la projection des dix films que nous vous présentions en sélection officielle du Festival Alimenterre Belgique 2020, la diffusion de la capsule « Le paradoxe de la faim » a particulièrement fait écho à la réalité des agriculteur·rice·s congolais·e·s. Trois ateliers ont également eu lieu autour de la pisciculture, du maraîchage, de la transformation agroalimentaire et ses chaînes de valeur.
En 2020, place aux jeunes !
En 2020, une grande nouveauté a vu le jour dans les deux éditions internationales qui fait la part belle aux jeunes : un concours de création audiovisuelle pour les étudiants sénégalais et un concours de courts-métrages destiné aux jeunes professionnels et amateurs du monde audiovisuel congolais. Deux projets qui confirment une tendance générale à donner la parole aux générations futures, car les éditions du Festival Alimenterre appartiennent avant tout à leurs publics et doivent se construire avec eux pour se tourner vers l’avenir.
Baron Nkoy nous partage les raisons ainsi que le succès du concours de courts-métrages organisé en RDC :
Nous avons lancé ce concours de courts-métrages pour promouvoir les initiatives locales dans le domaine de l’agriculture familiale, mais également pour encourager les jeunes réalisateurs congolais à produire des films susceptibles d’être projetés dans les différentes éditions du Festival Alimenterre à travers le monde. L’objectif est d’exposer à travers ces films, les défis et les succès de paysans congolais. Et ça a bien marché ! Nous avons reçu un bon nombre de candidatures et à la fin, nous avons sélectionné trois courts-métrages qui remplissaient les critères de qualité et de profondeur exigés.

Le lauréat de cette année était Sady Masonga. Son film « Les bienfaits de la terre » raconte l’histoire de Nyirahabimana Léonnie, une paysanne et mère battante qui doit continuer à travailler malgré les dangers qu’elle encoure dans une zone de conflits armés.
La famille Alimenterre s’agrandit au Burkina Faso
À l’heure où nous écrivons ces lignes a commencé une toute nouvelle édition internationale du Festival Alimenterre au Burkina Faso. Cette première édition est née d’une collaboration entre SOS Faim et SemFilms Productions, structure burkinabaise qui organise depuis plusieurs années le Festival Ciné Droit Libre, un évènement reconnu au Burkina Faso et dans d’autres pays ouest-africains.
Le Festival Alimenterre Burkina Faso a lieu à Ouagadougou du 25 au 27 mars 2021 et est porté par de nombreux partenaires locaux et internationaux. Nous reviendrons prochainement sur cette nouvelle édition, certes limitée dans le contexte sanitaire actuel, mais qui promet déjà un beau succès pour la famille Alimenterre.